« La santé n’est pas que le médical. Le milieu de vie joue un rôle, l’isolement et les pratiques physiques aussi »

Expert•e•s, Travaux

Les 11 et 12 décembre, la convention citoyenne de Nantes a auditionné 35 expert.e.s sous forme de speed-dating d’une demi-heure. Parmi eux, Guillaume Baudouin, Pierre Caillault, Cécile Coutant et Charlotte Delpeux se sont prêté.e.s au jeu des questions des citoyen.e.s à propos de la santé en temps de covid. Extraits de quelques échanges.

Déterminants de la santé

Pierre Caillault, médecin en santé publique au SRAE Nutrition des Pays de la Loire : « La santé dépend de caractéristiques individuelles, mais aussi du milieu de vie, des systèmes sociaux et de santé du pays dans lequel l’on vit. Au plan individuel, les comportements favorables à la santé concernent la qualité de l’air, l’alimentation, l’activité physique et la non consommation d’alcool et de tabac. »

Cécile Coutant, responsable de l’association Les Forges médiation : « La santé au sens de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ce n’est pas seulement le médical. La personne est pleine et entière : on ne peut pas la découper en morceaux : santé, logement, éducation, alimentation. »

Charlotte Delpeux, chargée de communication Air Pays de la Loire : « Chaque jour on mange 1 kilo de nourriture, on boit 2 kilos d’eau et on absorbe 15 kilos d’air. On pense à manger bio, on parle de qualité de l’eau mais on ne fait pas attention à celle de l’air ! Or la pollution de l’air extérieur est classée comme cancérogène par l’OMS depuis 2013. Une mauvaise qualité de l’air peut générer des irritations des voies respiratoires et un déclenchement plus fréquent de crises d’asthme. »

Santé et isolement

Guillaume Baudouin, directeur de l’association Centre social spécialisé Rencontre et recherche : « Sortir, aller à l’extérieur pour un rendez-vous, c’est une démarche qui est en soi un début de sortie de l’isolement. Avec le confinement, cette possibilité a disparu. »

P.C. : « Un aspect que le confinement nous a rappelé, c’est que l’isolement est un facteur qui influe sur de nombreuses maladies et accroît les pertes en santé des gens. C’est largement démontré. »

Santé mentale et confinement

P.C. : « Ce qui nous alerte aujourd’hui, c’est la santé mentale des gens. L’accumulation des coupures, l’arrêt des liens sociaux a un impact fort. »

G.B. : « Je m’inquiète pour les mois de février-mars du fait du deuxième confinement qui semble avoir touché de manière plus violente les gens. Le premier confinement, c’était original, inédit. Avec le deuxième, on a tous pris un coup derrière la tête. On le reçoit encore plus durement quand est fragile, d’autant que les perspectives n’engagent pas à l’optimisme. »

Activité physique et confinement

P.C. : « L’activité physique, ce sont tous les moments que l’on a pour bouger, et pas seulement le sport. Elle est déterminée certes par des motivations individuelles mais aussi par l’environnement social et culturel dans lequel on évolue, l’environnement bâti et naturel, la qualité de l’air… Les enquêtes ont montré que confinement a plutôt été bénéfique à ceux qui en faisaient moins. Les plus actifs ont plutôt diminué leur pratique physique. Et tout le monde s’est rendu compte que bouger, c’est vital. »

Qualité de l’air, météo et confinement

C.D. : « A Nantes, l’air est de bonne qualité 80% du temps, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problématiques sur les 20% restant. La baisse d’activité liée au confinement de mars a eu un impact positif sur la qualité de l’air, en particulier sur les niveaux de polluants majoritairement émis par le trafic routier. Les oxydes d’azote ont ainsi baissé de 54% en moyenne sur Nantes Métropole et de 65% au niveau du boulevard Victor-Hugo à Nantes. »

P.C. : « On accorde trop d’importance à la météo : les suédois sont plus actifs que nous alors qu’il fait plus souvent nuit et froid chez eux. »

Médiation en santé

C.C. : « L’objectif de la médiation en santé, c’est de lutter contre les inégalités de santé, de faire avec et de travailler en réseau. Chaque situation est différente, les médiateurs n’ont pas de présupposés : ils écoutent et accueillent ce que l’autre a envie de déposer. L’objectif n’est pas de se substituer à la personne, ni de créer une dépendance. »

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Légende photo :
Pierre Caillault est médecin de santé publique au SRAE Nutrition des Pays de la Loire. Cécile Coutant est responsable de l’association Les Forges. Manquent sur la photo Charlotte Delpeux, chargée de communication de l’association Air Pays de la Loire et Guillaume Baudouin, directeur de l’association Centre social spécialisé Rencontre et recherche.