3 questions à Elvire Bornand, garante de la convention citoyenne
Elvire Bornand est sociologue, enseignante à l’École de Design de Nantes Atlantique.
Elle est l’une des 4 garants de la Convention citoyenne de Nantes Métropole « Vécus de crise et aspirations pour demain », chargés de vérifier que la démarche se déroule en toute indépendance et dans de bonnes conditions.
Qu’est-ce qui vous a incité à répondre positivement à cette mission de garante ?
La sortie du confinement m’a désespérée ! Quand je voyais applaudir le soir à 20h, j’espérais que l’on allait vraiment se saisir de ce que l’on voulait comme société en terme de santé et d’égalité. Et puis en mai, il n’était plus question de rien ! Ça a été un vrai questionnement de mes engagements : est-ce que j’avais encore envie de faire mon métier de sociologue, de caractériser les inégalités, de demander aux plus démunis de me parler de leurs vies si rien ne changeait derrière ? Quand on m’a sollicité pour être garante, je n’ai pas hésité longtemps : j’ai encore envie de croire que l’on peut faire collectif et qu’on peut le faire en s’appuyant sur la population.
À quoi serez-vous particulièrement attentive dans cette position de garante ?
Je serai attentive à ce que l’on entende la contradiction, que l’on permettre à ceux qui ne sont pas d’accord avec le point de vue dominant de s’exprimer. Il faut prendre le conflit comme une force d’explorer nos croyances et savoir se « disputer sereinement » ! Je ferai aussi attention à ce que ceux qui ont plus de mal à parler et qui ont souvent été les premiers confrontés à l’impact de cette crise, soient entendus. Je veillerai aussi à ce que les citoyens produisent quelque chose qui ne soit pas lisse, avec des aspérités, des tensions, et pas seulement, bien sûr, des communs. Il ne s’agit pas de faire émerger la « meilleure » solution mais de constituer une mine dans laquelle aller piocher pour nourrir le futur des politiques publiques.
Avez-vous un message à faire passer aux 80 citoyens qui se sont engagés ?
Qu’ils viennent avec ce qu’ils sont car ils reflètent chacun une partie de la population. En même temps, ils participent à une démarche qui va profiter à tous : il faudra donc aller au fond des choses et détricoter ses points de vue. Plus largement, je veux dire aux habitants de la métropole que nous avons de la chance : notre territoire résiste plutôt bien à la crise. Mais il n’est pas possible de requestionner la société en restant chacun dans sa zone de confort. L’action collective ne correspondra jamais exactement à ce qu’on voudrait pour soi.